Le
Lectorat, Un ministère vital
par le diacre Sergius
Halvorsen
LA
LECTURE LITURGIQUE
ASPECTS
PRATIQUES DE LA LECTURE LITURGIQUE
ANNEXE
I : LECTURE DE L’ÉPÎTRE
ANNEXE
II : RÔLE DU LECTEUR DANS LES OFFICES
Un culte raisonnable
La liturgie chrétienne orthodoxe est une rencontre avec le
Verbe de Dieu incarné, rendue possible par un culte intelligible qui nous
touche par l’intermédiaire de tous les sens humains : la vue, l’odorat, l’ouïe,
le toucher et le goût. Pourtant, lorsque nous envisageons l’ensemble des
éléments qui composent la liturgie orthodoxe – incluant les processions, les
icônes, les encensements, le signe de la croix, les prostrations – le reste du
culte est mené par le biais du langage. C’est par le biais du don divin du
langage humain que nous entendons la Bonne Nouvelle, l’Évangile de
Jésus-Christ, que nous chantons les textes liturgiques, les psaumes, les
tropaires et le Symbole de foi, et que nous prions et faisons l’expérience de
Jésus-Christ, le Verbe de Dieu incarné.
Lors de l’épiclèse (l’invocation du Saint-Esprit sur le peuple
de Dieu et sur les dons du pain et du vin) de l’anaphore de la Divine Liturgie,
nous prions avec le prêtre : « Nous t’offrons encore ce culte raisonnable. » Le
mot grec traduit ici par « raisonnable » ou « rationnel » est logikêin, qui
vient de la racine logos, mot également utilisé par l’évangéliste en référence
à Jésus-Christ comme le Verbe de Dieu (Jean 1,10). Logikêin réfère à la
capacité humaine de penser, de savoir et de comprendre – la capacité
rationnelle qui démarque les êtres humains, faits à l’image et à la
ressemblance de Dieu, des créatures irrationnelles. En bref, une des facettes
les plus caractéristiques de l’humanité est la capacité de penser, de
comprendre et de communiquer par le biais du langage. Par conséquent, la
Liturgie n’est pas magique : lorsque nous nous réunissons pour le culte, nous
ne jetons pas de sort à personne. Nous offrons plutôt notre action de grâces,
notre eucharistia, à Dieu par l’intermédiaire de mots intelligibles. La tâche
principale du lecteur est de proclamer la Parole de Dieu, et de faciliter ainsi
la célébration de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.
Bien entendu, dans la Divine Liturgie, c’est le prêtre ou le
diacre qui lit les écrits que l’on appelle « les Évangiles ». Cependant, les
Épîtres de saint Paul sont non seulement antérieures aux écrits des
évangélistes, mais saint Paul nous rappelle qu’il prêche l’Évangile de
Jésus-Christ par le biais de ses écrits (saint Paul insiste fortement sur ce
point dans Galates 1). Ainsi, lorsqu’un lecteur lit l’épître lors de la Divine
Liturgie, il ou elle lit effectivement l’Évangile ; il ou elle proclame la
Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. Parfois, l’on entend dire : « Je ne suis qu’un
lecteur », comme si c’était un ministère sans importance. Cependant, lorsque le
lecteur (tonsuré ou non) commence à psalmodier l’extrait des Actes ou des
Épîtres, il ou elle est en train d’accomplir un ministère évangélique
absolument essentiel à la célébration de la Divine Liturgie, qui demande le
même soin et la même préparation que tout autre ministère liturgique.
La tâche du lecteur
La tâche du lecteur est de psalmodier les textes bibliques :
les Actes des Apôtres ou les épîtres lors de la Divine Liturgie ; les lectures
de l’Ancien Testament lors des Vêpres de certaines fêtes ; en certaines
occasions, le Cantique de Siméon (Luc 2, 29-32) et la prière dominicale
(Matthieu 6, 9-13) ; et lors des offices quotidiens, des extraits des Psaumes.
En fait, à part les courts textes du Trisagion ou le « Gloire au Père…
maintenant et toujours… » qui terminent les lectures du Psautier, le lecteur
est fondamentalement un lecteur des Saintes Écritures.
Ceci ne doit pas surprendre, puisque le culte liturgique
orthodoxe est biblique avant tout. Non seulement les offices sont eux-mêmes
principalement composés de textes provenant directement de la Bible, mais
l’année liturgique est également basée sur les Saintes Écritures.
Le contenu de la plupart des fêtes liturgiques provient
directement du Nouveau Testament. C’est uniquement à travers la relation par
les évangélistes d’événements tels que la Nativité du Christ ou la
Transfiguration que nous célébrons ces fêtes de notre Seigneur et Sauveur.
Pourrait-on imaginer la célébration de la Fête de la Nativité sans entendre le
récit de la naissance de notre Seigneur et Sauveur (Matthieu 2, 1-12) ou la
Fête de la Transfiguration sans entendre le récit de cette étonnante révélation
sur le Mont Thabor par l’évangéliste (Matthieu 17, 1-9) ? On peut également
penser à la Liturgie vespérale de saint Basile, avec ses quinze lectures de
l’Ancien Testament.
Dans toutes ces circonstances, notre rencontre avec les
Saintes Écritures façonne et définit notre rencontre avec Dieu – Père, Fils et
Saint-Esprit. Il serait possible de dire que notre liturgie donne accès à une
réalité biblique, ou une occasion nous permettant d’atteindre la pensée des
Saintes Écritures. Et qui donc (à moins qu’il y ait plus d’un diacre en service
à la Liturgie) proclame les textes bibliques définissant les Fêtes de
l’Ascension (Actes 1, 1-12), de la Pentecôte (Actes 2, 1-11) et du saint
protomartyr Étienne (Actes 6,9-7,59) ? C’est le lecteur.
Avant que le lecteur ne commence à psalmodier un texte
biblique, ses mots ne sont que de l’encre sur papier, des inscriptions qui
n’agissent pas en elles-mêmes. Ces inscriptions graphiques deviennent toutefois
les mots vivifiants des Saintes Écritures lorsqu’ils sont prononcés par le
lecteur. Voilà la tâche primordiale du lecteur : donner vie à la Parole de Dieu
contenue dans les Saintes Écritures. La voix du lecteur qui psalmodie le texte
biblique nous fournit l’occasion de rencontrer le Verbe de Dieu, l’Évangile de
Jésus-Christ.
Les principes de la lecture liturgique
La beauté et l’intelligibilité sont les deux principes qui
régissent le culte orthodoxe. Comme nous l’avons dit plus haut, la parole doit
être intelligible afin d’être parole, et ceci est particulièrement pertinent au
sujet de la Liturgie, lors de la lecture des Saintes Écritures. Si un mot est
marmonné, mal prononcé ou inaudible, ce n’est pas un mot pour l’auditeur, mais
tout simplement un son. Il faut noter ici que la musique dans l’Église
orthodoxe est toujours une parole musicale. Il n’y a pas de préludes à l’orgue
ou de pièces orchestrales pendant la Liturgie, principalement parce que ces
formes musicales, malgré toute leur beauté, sont dépourvues de mots. Ainsi,
pour être efficace, la lecture liturgique doit être intelligible. Toutefois,
nous ne pouvons faire de l’intelligibilité le seul critère de la lecture
liturgique, parce que le culte chrétien authentique requiert également la
beauté.
Conscient que l’étude de la beauté occupe des milliers de
volumes, on peut simplement dire que l’effort visant à rendre le culte
liturgique aussi beau que possible prend sa source dans l’amour : l’amour de
Dieu pour nous, et notre amour pour Dieu. Lorsqu’une famille invite quelqu’un à
prendre un repas, ses membres font généralement tous les efforts possibles pour
nettoyer la maison, préparer un délicieux repas et offrir une belle soirée à
leur invité. Même s’ils ne possèdent pas de riche demeure, de fine porcelaine
et d’ingrédients gastronomiques, ils vont tout de même s’efforcer de faire de
leur mieux avec ce qu’ils ont à leur disposition. Ils savent que l’ensemble du
repas – la nourriture, sa présentation, la table et l’apparence de la maison –
constituent une manifestation d’amour pour leur invité.
Cette manifestation d’amour par le biais de la beauté est
également présente dans nos édifices religieux. Que ce soit la majestueuse
Sainte-Sophie, une église villageoise russe en bois sculpté, ou une petite
mission urbaine en Amérique du Nord, les églises orthodoxes sont toujours
construites et décorées de la plus belle manière possible. La beauté perçue
dans un édifice religieux témoigne de l’amour pour Jésus-Christ concrètement
manifesté dans ses fidèles. De même, le lecteur est appelé à proclamer la
Parole de Dieu d’une manière intelligible et belle, en tant que témoignage
concret de l’expression ultime de l’amour de Dieu, l’Évangile de Jésus-Christ.
DE LA LECTURE LITURGIQUE
1. Lire avant de lire
La plupart des langues occidentales sont très indulgentes pour
le lecteur, en ce sens qu’une connaissance pratique de la phonétique suffira
pour la prononciation. Le lecteur fait face à une plus grande difficulté s’il
doit psalmodier un texte en arabe, par exemple. L’écriture arabe ne comporte
pas de voyelles, seulement des consonnes, si bien que le lecteur doit
pratiquement avoir mémorisé le texte à lire avant même de prononcer un seul
son. Même si le français ou l’anglais ne sont pas toujours prévisibles en
termes de prononciation, ces langues peuvent induire les lecteurs en tentation.
Les lecteurs qui psalmodient en français ou en anglais peuvent supposer que du
moment où ils peuvent prononcer tous les mots qu’ils voient, ils seront
capables de lire le texte d’une manière belle et intelligible. Toutefois, ce
n’est pas toujours le cas. Examinons le texte suivant, tiré de l’Épître de
saint Paul aux Romains :
Frères, à qui travaille, le salaire n’est pas compté pour son
oeuvre comme don gratuit, mais comme chose due. Et à qui, sans fournir aucune
oeuvre, croit en celui qui justifie les pécheurs, on compte sa foi comme
justice. C’est ainsi que David proclame la béatitude de l’homme à qui Dieu
attribue la justice indépendamment des œuvres : « Heureux qui est absous de ses
péchés, acquitté de ses fautes; heureux l’homme à qui le Seigneur n’impute
aucun tort ».
Or donc, cette béatitude, concerne-t-elle seulement les
circoncis ou bien également les incirconcis ? Nous disons, en effet, que la foi
d’Abraham «lui fut comptée comme justice», mais quand lui fut-elle comptée ?
Après ou avant la circoncision ? Ce n’était pas après, mais avant qu’il fût
circoncis. Et le signe de la circoncision, il l’a reçu comme sceau de la
justice conférée par cette foi qu’il possédait quand il était incirconcis, en
sorte qu’il devint le père non seulement des croyants incirconcis, pour que la
foi leur fût comptée, à eux aussi, comme justice, mais également des circoncis,
de ceux au moins qui ne se contentent pas de la circoncision, mais qui marchent
sur les traces de cette foi que possédait, avant d’être circoncis, notre père
Abraham (Traduction père Denis Guillaume, L’Apôtre, Diaconie
apostolique, 1994).
Ce texte est lu lors de la Divine Liturgie pendant la semaine
qui suit la Pentecôte. Il s’agit d’un texte difficile, et la plupart des
lecteurs ont besoin de passer beaucoup de temps à relire et à réfléchir sur ce
passage afin d’en saisir les idées maîtresses et leur interrelations. Que
va-t-il se passer alors pour un lecteur qui commence à lire ce texte pendant la
Divine Liturgie sans l’avoir étudié auparavant ?
Ceux qui ont de la chance vont prononcer correctement les mots
dans le bon ordre, tandis que ceux qui sont moins chanceux vont trébucher sur
la syntaxe difficile, ou devenir totalement confus lorsqu’il s’agira de
psalmodier à haute voix un texte qui véhicule un argument théologique complexe.
Si le lecteur ne comprend pas le texte qu’il lit à haute voix, comment ceux qui
écoutent peuvent-ils comprendre ce qu’ils entendent ? Afin de psalmodier un
texte biblique de manière intelligible, le lecteur doit d’abord comprendre ce
texte. Cela ne veut pas dire qu’il ou elle doit posséder une compréhension
exhaustive de cette lecture ; le lecteur doit cependant posséder un certain
niveau de compréhension pour atteindre son objectif d’intelligibilité.
En règle générale, les épîtres figurent parmi les textes les
plus difficiles, sinon les plus difficiles qui soient lus lors de la Liturgie.
C’est notamment parce que, à la différence des Actes des Apôtres et des quatre
Évangiles, les épîtres ne sont pas des récits. Prenons par exemple le récit de
la Pentecôte tiré des Actes :
Lorsqu’arriva le jour de la Pentecôte, les Apôtres se
trouvaient tous ensemble dans un même lieu. Soudain retentit depuis le ciel un
bruit pareil à un souffle violent, qui remplit toute la maison où ils étaient
assis. Ils virent apparaître une sorte de feu, qui se partageait en langues,
pour se poser sur chacun d’eux. Alors ils furent tous remplis de l’Esprit saint
et se mirent à parler en d’autres langues, chacun s’exprimant selon le don de
l’Esprit.
Or il y avait, séjournant à Jérusalem, des Juifs fervents,
issus de toutes les nations qui sont sous le ciel. Au bruit qui se produisit,
ils se rassemblèrent en foule, et chacun eut la stupéfaction de les entendre
parler sa propre langue. Déconcertés, émerveillés, ils se disaient tous, les
uns aux autres: Ces hommes qui parlent, ne sont-ils pas tous des Galiléens ?
Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle?
Nous qui sommes Parthes, Mèdes ou Elamites, qui habitons la Mésopotamie, la
Judée ou la Cappadoce, le Pont, l’Asie, la Phrygie, la Pamphylie ou l’Égypte,
Libyens de Cyrénaïque, Romains résidant ici, Juifs de naissance ou prosélytes,
Crétois ou Arabes, tous, nous les entendons en notre propre langue proclamer
les merveilles de Dieu ! (Traduction père Denis Guillaume, L’Apôtre, Diaconie
apostolique, 1994).
Nous voyons immédiatement un autre piège pour le lecteur non
préparé. Les noms bibliques tels que « Galiléens », « Parthes », « Mèdes », «
Élamites », « Phrygie » et « Pamphilie ». Ces noms vont certainement prendre au
dépourvu le lecteur non préparé, et pourraient conduire à d’importantes erreurs
de prononciation ou de lecture, en disant par exemple « Galiciens » au lieu de
« Galiléens ».
Malgré la difficulté des noms bibliques, ce texte est
particulièrement facile à lire et à comprendre (différemment du texte extrait
de l’Épître aux Romains), à cause de son caractère narratif. Il s’agit d’une
histoire où les événements se déroulent selon une séquence temporelle normale ;
ce genre de texte est beaucoup plus facile à dire et à comprendre qu’un argument
théologique complexe. Les épîtres sont surtout composées de ce dernier type de
discours ; par conséquent, le lecteur avisé les étudiera attentivement avant de
commencer à psalmodier la péricope durant la Liturgie. Ce n’est pas sans raison
que l’évêque, durant la prière de tonsure du lecteur, exhorte le nouveau
lecture à « lire chaque jour les Saintes Écritures ». C’est une manière
liturgique de dire qu’il faut « lire avant de lire ».
2. Planifier la psalmodie
Une fois que le lecteur a étudié le texte et qu’il en a retiré
le sens, il doit établir un plan pour la psalmodie du texte. Dans le langage
liturgique courant, on dit que le lecteur « lit » l’épître, mais ce que l’on
fait en réalité durant la liturgie est très différent, par exemple, de lire une
histoire à un enfant avant qu’il s’endorme. Dans la plupart des traditions, le
texte est psalmodié recto tono, avec quelques variations d’une ou deux notes.
En d’autres mots, le texte biblique est chanté sur une mélodie très simple, la
plupart du temps sur la même note, et qui baisse ou monte d’une ou deux notes à
l’occasion. La complexité de la psalmodie peut varier considérablement :
certaines traditions liturgiques ont recours à des mélodies et à des cadences
très élaborées.
On affirme souvent, même dans certains instructions aux
lecteurs, que les lectures bibliques sont psalmodiées (par opposition à une
lecture parlée) pour éviter que le lecteur n’apporte des inflexions gênantes au
texte biblique. Bien qu’il y ait une part de vérité dans cette affirmation, la
tradition de la psalmodie ou du chant des textes liturgiques (les prières, la
Bible ou les compositions littéraires) comporte une préoccupation beaucoup plus
pratique : la transmission de la voix humaine. Il est beaucoup plus facile
d’entendre une voix solo qui psalmodie ou qui chante un texte, que si celui-ci
est lu en voix parlée. Toute personne qui donne des conférences ou qui parle
beaucoup en public, sait qu’il est beaucoup plus exigeant pour la voix humaine
de parler fort, plutôt que de chanter à un volume comparable ou plus élevé. Et
quiconque ayant servi à une Divine Liturgie en plein air (comme dans un
pavillon installé pour accueillir une grande assemblée), avec peu ou pas
d’amplification sonore, sait que la meilleure voix parlée ne pourrait pas être
entendue. La psalmodie des textes bibliques permet à toute l’assemblée
d’entendre les mots du texte.
Tel que nous l’avons fait remarquer plus haut, il existe une
variété de styles d’exécution de la psalmodie ou « lecture », selon les
traditions. Cependant, peu importe la tradition utilisée, le lecteur devrait
appliquer à la lecture liturgique de la Bible le même paradigme qui sous-tend
tout chant liturgique efficace, c’est-à-dire : le texte a priorité sur la
mélodie. Chaque langue a son rythme naturel. En général, le rythme est exprimé
à l’intérieur des mots français et anglais par une succession de syllabes
accentuées et non accentuées. Le rythme est également exprimé à l’intérieur de
la phrase par l’accent relatif sur des mots individuels. Si ce rythme n’est pas
respecté, les mots peuvent devenir incompréhensibles.
Les phrases ont également leur propre rythme. Par exemple,
dans la première phrase de la lecture de Pentecôte (Actes 2,1), le texte
comporte les accents suivants : « Le jour de la Pentecôte étant arrivé, ils se
trouvaient tous ensemble dans un même lieu. » Il existe un dernier type de
rythme, non moins important : le rythme narratif ou rhétorique. Lorsque l’on
raconte une histoire, il y aura au moins un point culminant sur le plan narratif.
Dans un raisonnement, il y aura au moins un point où l’on arrive à une
conclusion, sur la base des arguments qui précèdent : c’est le point culminant
sur le plan rhétorique. Peu importe le genre de psalmodie utilisé, il faut
rendre ces trois types de rythme linguistique afin que le texte soit aussi
intelligible que possible, et que soit préservée la beauté de la langue.
Dans la tradition slave, il existe un type de mélodie
psalmodique qui débute dans une tonalité très grave et qui monte graduellement,
pour conclure dans une tonalité très aiguë, avec une cadence simple. Cette
mélodie est exactement la même pour toutes les lectures, peu importe leur
longueur. Elle est particulièrement dramatique, surtout lorsque le lecteur ou
le diacre possède un grand registre vocal. Ce style de psalmodie est décrit
comme « montant de la tombe ». Le problème inhérent à cette mélodie est qu’elle
va presque certainement déformer le rythme naturel du texte. Cette mélodie «
suppose » que le point culminant de toute lecture biblique sur le plan narratif
ou rhétorique se trouve à la toute fin, ce qui n’est pas nécessairement le cas.
Souvent, le point culminant narratif d’un texte se situera vers le milieu,
comme c’est le cas de la lecture de Pentecôte. Dans le texte précédemment cité
de l’Épître aux Romains, il y a une emphase rhétorique au milieu, et au moins
deux autres dans la seconde moitié. Il est clair que ces deux textes requièrent
des mélodies de psalmodie suffisamment flexibles pour respecter les différentes
formes de rythme contenues dans le texte.
Certains diront que le lecteur liturgique doit s’efforcer de
psalmodier avec aussi peu d’accentuation et de rythme que possible, et qu’il
faut certainement éviter tout style de lecture qui impose au texte un rythme
dérangeant ou déformant. Toutefois, les humains ne parlent pas comme des
machines, et tous ceux qui ont entendu des voix générées par ordinateur savent
combien elles paraissent artificielles. Il en est ainsi parce que les
ordinateurs ne sont pas assez intelligents pour capter le rythme hautement
nuancé du langage humain. Par conséquent, la tâche du lecteur liturgique est de
psalmodier le texte biblique de manière à transmettre toutes les nuances du
sens par le biais du médium humain du langage.
Avec ces conseils en tête, même le lecteur le plus expérimenté
devrait lire le texte au moins une fois avant l’office, à haute voix, pour
pratiquer la lecture. Le débutant aurait intérêt à psalmodier le texte devant
une autre personne avant l’office, pour avoir ses commentaires. Le lecteur
souhaitera même peut-être inscrire des repères dans le texte afin de se
rappeler facilement les diverses intonations au moment de la lecture, lors de
la liturgie.
3. L’importance des finales
Pour bien psalmodier un texte biblique, il faut toujours
inclure une cadence finale. L’interprétation de cette cadence variera selon les
traditions ; la cadence est toutefois essentielle pour informer l’auditoire de
la fin de la lecture. C’est une erreur répandue d’omettre la cadence, si bien
que la lecture semble se buter contre un mur et s’arrêter net. Viennent ensuite
quelques moments tendus de complet silence, étant donné que personne n’est
certain que la lecture soit véritablement terminée. Une autre difficulté se
présente lorsque deux ou plusieurs lectures des épîtres sont prévues à l’office
du jour. Si tel est le cas, le lecteur devrait attendre à la fin de la dernière
lecture pour psalmodier la cadence finale, afin d’éviter toute ambiguïté
concernant la fin des lectures. La cadence peut être aussi simple qu’un
changement de tempo (ritardando), ou elle peut inclure une composante mélodique
spécifique. Mais peu importe la manière dont elle est interprétée, elle devrait
toujours indiquer clairement la fin de la lecture.
4. Le débit
Le dernier élément lié au rythme est le débit de la lecture.
Le lecteur débutant sera presque toujours tenté de lire trop rapidement. Pour
le débutant, la lecture peut paraître s’éterniser. La plupart des nouveaux
lecteurs sont nerveux de se tenir au milieu de l’église et d’être le centre
d’attention ; la réaction naturelle et inconsciente est d’accélérer pour
pouvoir en finir avec cette déplaisante expérience. Le simple fait de lire à
haute voix est quelque chose de nouveau pour la plupart des gens, qui liront
alors beaucoup plus rapidement qu’il ne le faut. Par conséquent, si la lecture
semble prendre trop de temps, c’est probablement qu’elle se déroule à peu près
au bon rythme. Le lecteur devrait prendre son temps et se permettre, ainsi qu’à
l’assemblée, d’apprécier ce qui est lu.
5. La diction
Même si plusieurs textes lus à l’église deviennent familiers
avec le temps, le lecteur devrait toujours supposer qu’au moins une personne
présente à l’église entend le texte pour la première fois ; par conséquent, la
prononciation correcte de chaque mot est essentielle.
Une fois que le lecteur comprend la lecture et qu’il s’est préparé à la lire de
façon à révéler le rythme organique du langage, il reste la tâche d’accomplir
la lecture avec précision. Ceci est avant tout une question de diction
adéquate. Les consonnes représentent une composante importante de la lecture
liturgique ; si le lecteur veille à ce que toutes les consonnes soient en
place, les voyelles couleront normalement. Le lecteur devrait faire
spécialement attention aux mots qui se terminent par des consonnes. Des mots
tels que « Seigneur » ou « livre » risquent de ressembler à « saigne » ou «
live ». Même si ces fautes de prononciation n’oblitèrent pas complètement le
sens du texte, elles réduisent la clarté globale de la lecture, compromettant
ainsi la beauté et l’intelligibilité.
Une diction claire est spécialement importante lorsque la
lecture est faite dans une église très grande, ou dont l’acoustique laisse à
désirer. (Les églises situées dans des espaces commerciaux dont le plafond est
recouvert de tuiles insonorisantes sont particulièrement reconnues pour réduire
au silence le meilleur des lecteurs). La prononciation nette et précise des
consonnes produira une lecture claire, parfaitement intelligible. Aussi,
il faut bien respecter les liaisons de prononciation entre les mots.
Le lecteur devrait aussi se rappeler que la diction correcte
requiert beaucoup de mouvements de la bouche : on ne peut pas prononcer les
mots correctement en gardant la bouche molle. Une bonne technique de pratique
consiste à s’imaginer que l’on essaie de parler à quelqu’un à travers une
fenêtre insonorisée. La seule façon d’y parvenir est d’exagérer les mouvements
normaux exécutés lorsque l’on parle. Même si ceci peut bien sûr être poussé à
l’extrême d’une manière déplacée, le bon lecteur s’appliquera toujours à ouvrir
la bouche et à bien prononcer chaque consonne.
Ainsi, tout en respectant toujours le rythme et l’intonation
naturelle du texte, le lecteur devrait s’efforcer d’articuler chaque consonne de
chaque mot. À cette fin, il ou elle devrait toujours recourir aux méthodes
employées par les chanteurs : la respiration et la posture appropriées, de même
que la production adéquate de la sonorité sont toutes nécessaires à une diction
juste. Une fois tous ces éléments essentiels mis en place, le lecteur est
susceptible d’atteindre un degré élevé de clarté.
6. Le volume et le ton
Les lecteurs devraient toujours être conscients de l’espace
dans lequel ils lisent, et à quel point cet espace est « actif » ou « mort »
sur le plan acoustique, selon le cas. Plusieurs variables affectent le degré
d’intensité requis pour la lecture, et celles-ci peuvent changer d’un jour à
l’autre, selon le nombre de personnes présentes à l’office, ou le nombre de
petits enfants qui offrent leurs sons joyeux (ou moins joyeux) au Seigneur. Par
exemple, une grande église dotée d’une bonne acoustique peut exiger moins
d’intensité qu’une petite église située dans un espace commercial au plafond
recouvert de tuiles insonorisantes, remplie à pleine capacité lors de la Vigile
pascale. Si le lecteur lit trop faiblement, on ne pourra pas l’entendre ; s’il
lit trop fort, le volume sera dérangeant.
Le lecteur doit également connaître son registre de psalmodie.
En général, les hommes auront tendance à lire dans une tonalité plus grave que
nécessaire ; s’ils choisissent une tonalité légèrement plus aiguë, ils
produiront un meilleur son. Les femmes, pour leur part, lisent souvent dans une
tonalité trop aiguë. Ce phénomène est lié aux harmoniques et à la résonance
particulière de l’église. La lecture par une soprano qui utilise les meilleurs
techniques vocales dans une tonalité très aiguë pourra être quasi
incompréhensible. Si c’est le cas, la lectrice peut simplement choisir une
tonalité de lecture légèrement plus grave.
7. S’ajuster au ton du célébrant
Dans certaines traditions orthodoxes, les lecteurs débutants
sont souvent préoccupés lorsqu’ils n’arrivent pas à s’ajuster au ton du diacre
ou du prêtre dans le dialogue d’introduction (« Sagesse » ; « Lecture… » ; «
Soyons attentifs ! »). Toutefois, il est plus important que le lecteur
psalmodie dans le registre le plus approprié à sa voix. Bien que ceci demande
plus d’habileté et d’expérience, le lecteur devrait également s’efforcer de
choisir une tonalité similaire à celle choisie par le prêtre ou le diacre.
Toutefois, il faut toujours se rappeler que le lecteur doit utiliser la
tonalité qui lui convient. Si le lecteur débute une lecture et se rend compte
que la tonalité est trop aiguë ou trop grave, il devrait s’arrêter et reprendre
dans une meilleure tonalité. Il n’est pas contre-indiqué de changer de tonalité
une fois la lecture commencée, car il n’y a rien de plus pénible que d’écouter
un lecteur grogner ou hurler, simplement parce qu’il ou elle ne veut pas
s’arrêter pour trouver la tonalité appropriée.
8. Le prokiménon et les versets de l’alléluia
Dans certaines traditions orthodoxes, le lecteur psalmodie des
versets des Psaumes sous la forme de répons avec le chœur, avant et
immédiatement après la lecture biblique. Sans entrer dans le détail de ce type
particulier de chant, le lecteur et le chef de chœur doivent garder à l’esprit
ces quelques points pratiques. Premièrement, ces deux éléments de la Liturgie
doivent être compris comme un bref échange entre le lecteur et les choristes ou
l’assemblée. Le lecteur devrait être conscient de la forme musicale utilisée
par les choristes, pour que les versets chantés ne viennent pas perturber la
mélodie des répons.
Selon une méthode courante, le lecteur doit psalmodier les
versets sur une note confortable dans la tonalité de la mélodie des répons. Il
existe une solution élégante mais exigeante sur le plan technique, où le
lecteur psalmodie les versets dans la même mélodie que les choristes ; cette
forme correspond peut-être le mieux à l’ancienne pratique du chant
responsorial.
De plus, le chef de chœur doit être attentif aux intervalles
entre le lecteur et les choristes, pour que les deux groupes produisent une
psalmodie cohérente sur le plan rythmique. Bien entendu, il existe de nombreux
aspects techniques facilitant l’efficacité du chant responsorial, mais la
solution la plus simple à tous les problèmes pouvant se présenter pour les
choristes est de pratiquer avec le lecteur. Ceci est particulièrement important
dans le cas des lecteurs débutants, qui ont peu d’expérience dans l’exécution
de la composante solo du chant responsorial. Si le nouveau lecteur a la chance
de pratiquer la psalmodie du prokiménon et des versets de l’alléluia dans un
contexte qui n’est pas intimidant, tel une répétition du chœur, il ou elle
pourra acquérir la confiance additionnelle qui découle de la pratique.
9. Déplacements et présentation
Avant de prononcer un seul mot, dans certaines traditions
orthodoxes, le lecteur fait une procession vers le devant de l’église et
traverse parfois le sanctuaire afin de recevoir une bénédiction du prêtre
officiant ou de l’évêque. Peu de lecteurs considèrent qu’il s’agit d’une
procession, mais cela ne l’est pas moins que le déplacement du diacre depuis le
sanctuaire jusqu’au milieu de l’église (dans la pratique slave) pour lire
l’Évangile. Ainsi, le lecteur devrait se déplacer sans hésitation, peut-être en
tenant le livre bien en vue, de la même manière que le diacre ou le prêtre
portant l’Évangéliaire en procession. Selon certaines pratiques, le livre est
ouvert à la page de la lecture au moment où le célébrant donne la bénédiction ;
dans ce cas, le lecteur se déplace en gardant le livre ouvert à la page de la
lecture. Dans les deux cas, le livre est porté respectueusement et le
déplacement se fait sans hésitation.
En outre, le livre utilisé par le lecteur devrait être aussi
attrayant que possible. Cela ne veut pas dire qu’il doit nécessairement avoir
une couverture en métal incrustée de pierres précieuses ; cependant, il ne
devrait pas être rempli de notes adhésives multicolores sortant de ses pages
comme un érable au mois d’octobre. Le livre ne devrait pas non plus avoir le
dos brisé ou la couverture déchirée. Tout comme l’Évangéliaire est conservé sur
l’autel, le livre utilisé par le lecteur devrait refléter physiquement
l’importance du texte qu’il renferme. Idéalement, ce devrait être le livre
de L’Apôtre (Diaconie apostolique, 1994) spécialement conçu à cette
fin.*
10. Être à l’écoute
La note finale de cette vue d’ensemble sur la lecture
liturgique doit nécessairement porter sur l’importance des commentaires
rétroactifs et de la pratique. Personne ne naît lecteur ; les lecteurs sont
choisis, formés et tonsurés, dans la plupart des cas. S’ils doivent accomplir
leur ministère à la gloire de Dieu, ils devront pratiquer et rechercher des
commentaires constructifs auprès de ceux qui les entendent lire. « Ai-je lu
assez fort ; pouviez-vous comprendre le texte ; est-ce que j’ai psalmodié dans
une tonalité appropriée à ma voix ; ai-je lu trop rapidement ; de quoi avais-je
l’air lorsque je me suis rendu à l’autel pour la bénédiction ; ai-je psalmodié
les versets du prokiménon sur une note adéquate ? » Le lecteur débutant devrait
demander de telles questions au prêtre, au chef de chœur, et même à quelques
membres de la communauté, afin de faire des progrès et de lire avec plus de
compétence. Il est même souhaitable que le lecteur expérimenté demande les
mêmes questions à l’occasion, simplement pour s’assurer qu’il ou elle n’a pas
développé de mauvaises habitudes au fil des années.
En conclusion de cette vue d’ensemble sur la lecture
liturgique, il faut préciser qu’il ne s’agissait effectivement que d’une vue
d’ensemble. Tous les aspects du chant liturgique accompli sont pertinents pour
une lecture liturgique accomplie, et comme tout musicien liturgique accompli le
sait, c’est la discipline de toute une vie. Dès que l’on devient satisfait de
soi par rapport à son exécution, il est probable que celle-ci en souffrira. Mais
si l’on demeure vigilant dans l’accomplissement du ministère vital du lectorat,
avec l’aide de Dieu, il nous sera possible de proclamer la Bonne Nouvelle de
Jésus-Christ à la gloire de Dieu.
La version anglaise originale de cet article est parue dans la
revue PSALM Notes, vol. 6, n° 2, printemps 2002, p. 1-7. Traduit et adapté
de l’anglais par Denis Lessard.
* L’Apôtre, Diaconie apostolique, 1994. Au Canada, ce
livre est disponible aux Pages Orthodoxes la Transfiguration : , pagesorthodoxes@outlook.com.
ANNEXE I : LECTURE DE L’ÉPÎTRE
La lecture de l’épître pendant la Divine Liturgie peut
comprendre trois parties : le prokiménon, l’Épître et l’alléluia. La pratique
est légèrement différente selon les traditions : dans la tradition slave, le
lecteur joue un rôle dans les trois parties ; dans la tradition grecque, le
prokiménon ne figure pas et l’alléluia est chanté exclusivement par le chœur.
Nous donnons ici des indications selon la tradition slave.
LE PROKIMÉNON
Conformément au Typikon, les Prokiména sont psalmodiés de la
façon suivante, le lecteur se tenant au centre de l’église :
UN PROKIMÉNON
Diacre : Soyons attentifs !
Prêtre : La paix soit avec vous tous !
Lecteur : Et avec ton esprit !
Diacre : Sagesse !
Lecteur : Le prokiménon dans le xième ton (le lecteur indique le ton du
prokiménon puis le lit une fois en entier)
Chœur : (Le chœur chante le prokiménon dans le ton approprié)
Lecteur : (Le lecteur psalmodie le verset du prokiménon)
Chœur : (Le chœur répète le prokiménon)
Lecteur : (Le lecteur psalmodie (ou chante dans le ton approprié) la première
moitié du prokiménon)
Chœur : (Le chœur chante la deuxième moitié du prokiménon)
Lorsqu’il y a plus d’une lecture, par exemple lors de
certaines fêtes ou périodes festives, les Rubriques prescrivent habituellement
un deuxième prokiménon et aussi un deuxième alléluia.
DEUX PROKIMÉNA
Diacre : Soyons attentifs !
Prêtre : La paix soit avec vous tous !
Lecteur : Et avec ton esprit !
Diacre : Sagesse !
Lecteur : Le prokiménon dans le Xième ton : (Le lecteur indique le ton du
premier prokiménon et le lit en entier)
Chœur : (Le chœur chante le premier prokiménon dans le ton approprié)
Lecteur : (Le lecteur psalmodie le premier verset du premier prokiménon)
Chœur : (Le chœur répète le premier prokiménon)
Lecteur : Dans le Xième ton (Le lecteur psalmodie le deuxième prokiménon)
Chœur : Le chœur chante le deuxième prokiménon
La lecture des prokiména se termine ici : le lecteur ne
psalmodie pas le verset du deuxième prokiménon.
L'ÉPÎTRE
Une fois le prokiménon chanté la lecture de l’Épître se fait
de la manière suivante :
UN ÉPÎTRE
Diacre : Sagesse !
Lecteur : Lecture de… (Le lecteur indique la lecture qui sera faite)
Diacre : Soyons attentifs !
Lecteur : (Le lecteur psalmodie la lecture. Lorsqu’il a terminé le prêtre bénit
le lecteur J
Prêtre : Paix à toi lecteur (ou : Paix à toi qui a lu)
Lecteur : Et à ton esprit.
Manière d’annoncer les lectures :
• Lecture des actes des Saints Apôtres
• Lecture de l’Épître du saint apôtre Paul aux Romains (etc.)
• Lecture de la première (ou de la seconde) Épître du saint apôtre Paul aux
Corinthiens (ou aux Éphésiens, ou à Timothée, etc.)
• Lecture de l’Épître catholique de Saint-Jacques (ou Jude)
• Lecture de la première (ou deuxième, ou troisième) Épître catholique du saint
apôtre Pierre (ou Jean).
Les lectures commencent de la façon prescrite dans l’Apôtre.
Si les rubriques prescrivent deux lectures de l’Apôtre, à la fin de la première
lecture le lecteur fait une courte pause puis commence la seconde lecture sans
l’annoncer. Parfois les rubriques indiquent une troisième lecture tirée de
l’Apôtre. Si l’on s’en tient à une pratique stricte, la troisième lecture
suivra la deuxième comme si elles n’en faisaient qu’une.
L'ALLÉLUIA
UN ALLÉLUIA
Après la bénédiction du lecteur par le prêtre à la fin de la
lecture, le diacre dit :
Diacre : Sagesse ! (Parfois omis dans la pratique actuelle)
Lecteur : (à voix forte et haute) Alléluia ! (Dans la pratique actuelle, le
lecteur psalmodie souvent l’alléluia trois fois)
Chœur : Alléluia, alléluia, alléluia ! (Le nombre d’alléluias dépend de la
partition musicale choisie)
Lecteur : (Le lecteur psalmodie le premier verset de l’alléluia)
Chœur : Alléluia, alléluia, alléluia !
Lecteur : (Le lecteur psalmodie le deuxième verset de l’alléluia)
Chœur : Alléluia, alléluia, alléluia !
DEUX ALLÉLUIA
Si les rubriques prescrivent un deuxième alléluia, il est
chanté de la manière suivante :
Diacre : Sagesse !
Lecteur : (À voix forte et haute) Alléluia ! (puis il psalmodie immédiatement
le premier verset du premier alléluia)
Chœur : Alléluia, alléluia, alléluia !
Lecteur : (Il chante le deuxième verset du premier alléluia)
Chœur : Alléluia, alléluia, alléluia !
Lecteur : (Il psalmodie le premier verset du deuxième alléluia)
Chœur : Alléluia, alléluia, alléluia !
Même si le Typicon n’en fait pas mention, il arrive que dans
la pratique le ton de l’alléluia soit également indiqué, par exemple : Alléluia
dans le Xième ton.
Même lorsqu’il y a trois lectures de l’Apôtre, on ne doit
jamais chanter un troisième ensemble de versets d’alléluias. Selon la pratique
stricte, ce troisième ensemble de versets d’alléluia devrait être confié à un
premier lecteur qui le lit pour lui-même en silence.
Certains livres donnent des alléluias sans indiquer de
versets. Dans ce cas, l’alléluia est chanté une seule fois. Dans plusieurs cas,
un seul verset est donné pour l’alléluia. Par conséquent l’alléluia n’est alors
pas chanté une troisième fois.
ANNEXE II : RÔLE DU LECTEUR DANS LES OFFICES
Selon l’usage local, le lecteur peut avoir un rôle très
important aux offices quotidiens. Par exemple, beaucoup de paroisses célèbrent
les heures de Sexte (sixième heure) et de None (neuvième heure) avant la
célébration dominicale de la Divine Liturgie. Ces offices, de même que les
autres « petites heures », sont typiquement portés presque exclusivement par le
lecteur, qui psalmodie ou lit les prières et les psaumes prévus.
De même, le lecteur peut jouer un rôle plus ou moins important
en la célébration des offices majeurs, les vêpres, les complies et les matines,
selon l’usage local. Par exemple, les vêpres et les matines comprennent la
lecture de psaumes fixes et aussi du Psautier, et c’est normalement un lecteur
qui en fait la lecture. D’autres parties de ces offices peuvent être soit
chantées soit lues par le lecteur, selon l’usage local. Des lectures de
l’Ancien Testament sont souvent prévues aux vêpres, non seulement aux vêpres
des grandes fêtes liturgiques, mais aussi aux fêtes de beaucoup de saints. Il y
a typiquement trois textes de l’Ancien Testament, qui peuvent être lues par un
ou par plusieurs lecteurs. Les lectures sont séparées par un court échange
entre le célébrant et le lecteur : « Sagesse » – (le lecteur lit le titre de la
lecture) – « Soyons attentifs » – (le lecteur lit le texte prévu). Le célébrant
doit donc être averti à la fin de chaque lecture par l’intonation finale du
lecteur, comme à la fin de la lecture de l’épître.
Aussi, les offices de certaines grandes fêtes liturgiques, par
exemple, la Nativité du Christ, la Théophanie, et les Jours saints, comprennent
des lectures de l’Apôtre, accompagnées ou non par un prokiménon et l’alléluia.
La lecture de psaumes et de l’Apôtre est également prévue dans
la célébration de la plupart des sacrements (par exemple l’initiation
chrétienne, le mariage et l’huile sainte), et beaucoup d’autres offices
célébrés couramment (par exemple, les funérailles, le molében, la paraclisis
etc.) prévoient la lectures de psaumes et parfois aussi de l’Apôtre. Le lecteur
peut donc être appelé à faire ces lectures.
Dans tous ces cas, il incombe donc au lecteur de se
familiariser avec la structure des offices, à la fois les parties fixes et les
parties variables et de savoir dans quels livres liturgiques se trouvent les lectures
prévues pour les offices des différentes fêtes. Ceci lui permettra d’accomplir
sa tâche sans hésitation et avec confiance, contribuant ainsi au bon
déroulement des offices de l’Église.
Le commun des offices quotidiens se trouvent dans le Livre des
heures (Horologion), dont il existe plusieurs versions en français : La
prière des Églises de rite byzantin, tome I, La prière des heures, Éditions de
Chevetogne, 1975 ; Grand livre d’heures, Diaconie apostolique, 1989 ;
et Le livre des heures, Fraternité orthodoxe en Europe occidentale. Le
rituel des sacrements se trouvent dans L’Euchologe (Grand Euchologe
et Arkhiératicon, Diaconie apostolique, 1992).