L’OPTIMISME
DE L’ORTHODOXIE
L’OPTIMISME
DE L’ORTHODOXIE
Alexandre
Kalomiros
Ne soyez pas pessimistes, nous disent les faux-pasteurs.
"L’Orthodoxie est caractérisée par l’optimisme. Dieu n’abandonnera jamais
son Eglise et les portes de l’enfer ne pourront rien contre elle".
En effet, L’ORTHODOXIE est optimiste, mais seulement en ce qui
regarde Dieu et en tout ce qui vient de Lui. Dieu est amour tout-puissant.
Jamais Il ne nous abandonnera. C’est nous qui risquons de l’abandonner et c’est
cela que nous devons craindre. C’est de la crainte de voir les hommes
s’éloigner de leur Créateur, que vient le pessimisme chez tous ceux qui ne
ferment pas, volontairement, les yeux devant la réalité. L’Eglise du
Christ n’aura jamais rien à craindre, même si elle devait être réduite à deux
ou trois membres sur la terre.
Ce n’est pas l’Eglise qui est en danger, c’est nous qui sommes
en danger. La question est de savoir combien d’entre nous resteront, à la fin,
dans l’Eglise éternelle et immortelle du Christ, qui comme Lui-même,
s’identifie à la Vérité.
Les perspectives terrestres n’ont jamais été optimistes.
Jamais les chrétiens n’ont mis leur espérance en une amélioration de leurs
conditions de vie tant spirituelle que matérielle, dans ce monde périssable. Le
cheminement de l’Histoire vers sa fin a été décrit par le Seigneur et par ses
disciples avec les couleurs les plus sombres. Les chrétiens prévoyaient et
attendaient la progression du péché et de la corruption qui devaient atteindre
leur sommet avant le glorieux et lumineux Second Avènement du Seigneur. Les
attentes millénaristes optimistes, d’un royaume terrestre, en ce monde de la
corruption, ont été condamnées, dès leur apparition, dans les premiers siècles
chrétiens. Le Royaume de Dieu que tout chrétien vit dans les profondeurs
de son cœur, comme arrhes de l’Esprit, ne saurait dominer et briller dans sa
gloire sur cette terre périssable. « On ne met pas le vin nouveau dans de
vieilles outres ». « Nous attendons de nouveaux cieux et une nouvelle terre où
la justice habitera » (Mc 2,22. 2 P 3,13).
Sans la résurrection des morts et le renouvellement de toute chose, que le Seigneur accomplira lors de son Second Avènement, nous ne pouvons parler de perspectives optimistes ; bien au contraire, « quand le Fils de l’Homme viendra sur la terre, trouvera-t-il encore la foi ? » (Lc 18,8).
LE SOUS-PRODUIT DU PARADIS
L’attente d’un paradis terrestre caractérise les tendances
religieuses et les tendances politiques, qui en substance, se confondent. Nous
les chrétiens « nous n’avons pas ici de cité permanente, mais nous cherchons
celle qui est à venir » Heb. 13,14.
Le diable n’aime pas que l’on désire la cité future et que
l’on œuvre pour elle, mais que l’on s’installe sur cette terre périssable,
comme si nous devions y vivre éternellement, et qu’on l’améliore, et qu’on la
rende le plus possible, permanente et confortable.
Il nous trompe en nous faisant croire qu’un paradis est
possible sans la résurrection, sans le renouvellement de toute chose, sans
l’incorruptibilité, en d’autres termes, sans le Christ Ressuscité.
Le Paradis que nous avons perdu, nous nous efforçons de le remplacer par la
civilisation. Nous avons abandonné Dieu et sa création pour servir les
œuvres de nos mains auxquelles nous nous sommes asservis pour notre perte.
Toute l’activité humaine, tout le sang et toute la sueur répandus par les
hommes ne visent qu’un but : Comment bien s’installer dans notre prison
obscure et sans soleil.
Les hommes n’ont pas cru au Christ, parce qu’Il ne leur a pas
apporté des biens terrestres mais célestes, et qu’il leur a même demandé de
renoncer aux biens terrestres et tangibles, afin d’atteindre les biens céleste
et impalpables. Et même ceux qui ont cru attendent qu’Il leur donne, en échange
de leur foi et de leur obéissance, des biens terrestres. Ils veulent que tout
aille bien dans leur vie. Ils veulent la Loi de Dieu observée par tous, afin
que le bonheur temporel règne sur toute la terre. Ils veulent un sous-produit
du royaume de Dieu et non le Royaume lui-même. Tout sous-produit contraint
l’homme à la perte de sa capacité de recevoir et de vivre la chose vraie
elle-même. Quand le diable tentait le Christ au désert, il lui demandait,
justement, de donner aux hommes ce bonheur terrestre, sachant très bien que ce
bonheur leur apporterait la mort éternelle. Les hommes utilisent le
christianisme comme un moyen en vue d’un monde meilleur ; ils se croient chrétiens
et se trompent eux-mêmes.
LA NECESSITE DE LA TYRANNIE
« Qu’est-ce que la Vérité ? » Cette question ennuyeuse et
agnostique du Gouverneur Romain, les tyrans spirituels et politiques de toutes
les époques l’ont répétée « Elle ne m’intéresse pas, disent-ils, la Vérité
impalpable. L’important, c’est un gouvernement monolithique. Tout ce que vous
dites sur l’unité intérieure qu’apporte, soi-disant, la Vérité, là où elle
existe, nous, nous l’écoutons par politesse. Ce qui nous intéresse c’est l’unité
extérieur et tangible, que tous voient, respectent et craignent. Et cette unité
ne peut exister sans discipline, sans contrainte. L’obéissance libre et
volontaire dans l’amour que vous prônez, voilà quelque chose de ridicule pour
hommes ridicules. Ce que nous voulons, c’est l’efficacité. L’âme de tel ou tel
ne nous intéresse pas ; ce que nous voulons, c’est la domination des foules,
des masses, du monde entier. Nous ne tolérons pas de schismes. Vous, vous dites
qu’il faut séparer les brebis d’avec les boucs. Nous, nous répondons que les
brebis sont nécessaires et, à défaut de loups, du moins des chiens de bergers
et des bergers pour les faire paître, pour les égorger et pour les manger. Non,
messieurs ! La Vérité, même si elle existe, doit toujours être mêlée au
mensonge pour n’être pas dangereuse. La Vérité pure est chose très dangereuse.
Et nous, nous ne sommes pas pour le risque. Le temps des actes de courage est
périmé ! Nous sommes des pacifistes ! Bas la guerre ! Laissez-nous tranquilles
pour vivre notre petite vie sur cette terre et le plus confortablement
possible, le plus glorieusement possible. S.V.P. pas de zèle naïf… »
Là où est le Christ, aucune nécessité d’unité administrative
ne s’impose. Le Christ est « UN » en « NOUS ». « Qu’ils soient UN comme
nous sommes UN ». C’est lorsque nous abandonnons le Christ que nous sentons la
nécessité d’une administration monolithique et même la nécessité d’une
tyrannie. Le Papisme est un exemple. L’Orthodoxie n’a jamais connu
d’administration monolithique, mais des relations fraternelles et familiales.
Le Grand Pontife et Roi des Rois n’était pas de ce monde périssable bien que
partout présent. Le Royaume de Dieu n’est pas de ce monde. Ce monde appartient
au prince de ce monde, qui est le premier tyran, le chef de tous les tyrans de
la terre, tant religieux que politiques. Seul le Christ unit les hommes
entre eux, Lui seul les unit ontologiquement avec Dieu en Sa Personne. Le
Christ n’oblige personne à le recevoir. C’est quand il fait défaut que se pose
alors, automatiquement, la nécessité d’une cohésion extérieure, de l’obéissance
obligatoire, de la tyrannie étatique ou spirituelle, démocratique ou
oligarchique, peu importe.
L’octroi d’un roi à Israël a été une condescendance de Dieu,
pour un peuple au cou raide et de peu de foi, qui voulait un roi visible et
palpable et non pas du Christ habitant son cœur. Dieu leur a donné un roi pour
éviter que le diable ne leur en donne un à lui ; Dieu a agi ainsi à cause de la
dureté de leur cœur et de leur peu de foi.
Il en va de même pour le Nouvel Israël. S’il y a marge pour
une économie, une discipline extérieure étatique, il ne peut y avoir de marge
quand la discipline est spirituelle et ecclésiastique ; car, en ce cas, le
Christ est remplacé, relégué exclusivement, dans les limites du Royaume des
cieux. Le Papisme comme les autres tyrannies, ont chassé le Christ de la vie
des hommes, ont usurpé sa place, l’ont "condamné" à se confiner au
ciel pour nous laisser libre la terre. L’œcuménisme se caractérise par son
indifférence envers la Vérité (le Christ) ; ce qui l’intéresse, c’est la
cohésion administrative et monolithique qu’il appelle « UNION DES EGLISES »,
une union administrative, dans la vague confusion des confessions, une union
aux perspectives universelles, aux dimensions politico-religieuses.
Sous nos yeux se construit l’Etat Mondial. Il va unir toutes
les religions et tous états de la terre sous son pouvoir absolu. Son
infrastructure intégrale est déjà mise en place. Ce sera un état dans le sens
absolu, la soumission qu’il exigera ne sera pas seulement physique, elle sera
aussi et surtout spirituelle. Le monde entier l’attend et le désire avec
nostalgie, comme le seul espoir de réalisation de ses rêves millénaristes
de toutes les époques, d’un paradis terrestre au sein de la corruption et de la
mort !
L’ETAT ELECTRONIQUE
Cet Etat moderne mécanographique, provisoirement impersonnel
sera le tyran incomparablement le plus efficace que l’humanité ait connu
jusqu’ici. Sa puissance sera dans sa capacité de connaître le citoyen en
profondeur et de s’imposer à lui, de l’intérieur et non pas seulement de
l’extérieur, comme hier encore. Tous les Etats locaux, tout-puissants,
s’unissent, coordonnent et augmentent leur force et leur pouvoir de pénétration
atteint leur sommet. Ils disposent de moyens considérables pour dominer les hommes,
que les tyrans du passé n’ont jamais osé rêver. Derrière une apparence
démocratique, parfaite et irréprochable, les citoyens sont liés par des fils
subtils et invisibles, mais o combien puissants. Nous sommes à l’époque des
cerveaux électroniques et des moyens électroniques d’information des masses.
Très peu d’hommes comprennent ce genre de tyrannie, tant leur
asservissement par l’Etat moderne est moral. Une exploitation systématique de
la pensée les a préparés, depuis des siècles, à désirer cette soumission. Le
futur Etat sera l’expression des désirs pan-humains. Nous attendons,
aujourd’hui, de l’Etat tout ce que les païens demandaient à leurs dieux. On
veut que l’Etat soit notre nourrice, notre protecteur, notre dieu. On lui
demande la nourriture, le vêtement, le logement, les vacances, la protection de
notre santé. Et l’Etat accepte, avec malice, ce défi même et il
l’entretien. Il demande seulement, en échange, que les hommes renoncent à leur
indépendance d’esprit et de cœur. Nous lui cédons nos droits d’aînesse pour un
plat de lentilles. Nous avons permis à l’Etat de pénétrer dans nos foyers, dans
nos relations familiales, d’influencer notre pensée, de multiplier ou non nos
enfants. Nous lui avons cédé notre patience, la possibilité de connaître à notre
place ce qu’il nous faut pour nous aliéner. Il dirige nos contestations vers
des antithèses fausses et artificielles, de manière à nous donner l’impression
d’être libre dans le fait de choisir entre tant de choses contradictoires,
comme entre Marxisme et Capitalisme, deux aspects de l’antique
culte de Mamôn. La mentalité des hommes est devenue, désormais, uniforme, de
même que leur vie, leur apparence, leurs habitudes, leurs désirs, leur attente,
uniformité qui arrive jusqu’à la langue commune universelle, colonne vertébrale
de notre soumission au mécanisme unique et universel qui nous entoure, tels des
poissons dans le filet que nous ne percevons pas. On nous conditionne avec des
méthodes psychologiques subtiles pour nous amener à vouloir, à accepter, à croire,
ce qu’il nous convient, ce que nous aurons à accepter d’une manière ou d’une
autre. Les uniformes rayés, que nous porterons dans la galère mondiale, sont
déjà cousus. La "groupification ", la "troupification ", la
"massification " de l’humanité, est déjà substantiellement là. Le
"mystère de l’iniquité " touche à son terme final, parce que les
hommes « n’ont pas voulu accepter et aimer la Vérité qui les eût sauvés.
» 2 Tim. 2, 10.
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