Saint
Jean Climaque
L'Échelle sainte degré XXVIII, I
Si vous envisagez la prière en elle-même, dites que c'est une
sainte conversation, une douce union avec Dieu; mais si vous considérez sa
vertu et sa puissance, il faut dire que c'est elle qui conserve le monde,
réconcilie la terre avec le ciel, produit les larmes sincères du repentir et en
naît quelquefois, efface les péchés, triomphe des tentations, nous console et
nous protège pendant le temps fâcheux des afflictions, met une fin et un terme
aux guerres cruelles que nous font nos ennemis, exerce dans nous les fonctions
des anges, devient la nourriture des esprits, procure les joies futures,
entretient le cœur dans une action continuelle, fait acquérir les vertus,
obtenir les dons célestes, et avancer à grands pas dans les voies de la
perfection; il faut ajouter qu'elle est le vrai froment de l'âme, la lumière de
l'esprit, la ruine du désespoir, la maîtresse de l'espérance, le fléau de la
tristesse, la fortune des religieux, le trésor des solitaires, l'extinction de
la colère, le miroir des progrès dans la vertu, la démonstration certaine des
règles qu'on doit suivre, la manifestation de l'état de notre âme, la notion
claire des biens futurs et l'indice de la gloire éternelle; il faut enfin
avouer qu'elle est, dans la personne qui prie, une espèce de palais et de
tribunal où le souverain Juge, sans attendre le dernier jour, rend à tout
moment ses arrêts de justice et de miséricorde.