lundi 5 février 2024

 

Pourquoi les Orthodoxes utilisent-ils du pain levé lors de l’Eucharistie?



La vie Chrétienne Orthodoxe s’exprime totalement lors de la divine liturgie; exposition vivante de nos dogmes, de notre foi et du royaume du Seigneur. La liturgie elle même culmine dans l’offrande des Saints Dons : L’Eucharistie. Ce qui caractérise l’Eucharistie pratiquée dans l’Eglise Orthodoxe est l’utilisation du pain levé pour l’Eucharistie. Mais d’où viens donc cette pratique?


L’utilisation du pain levé est la pratique traditionnelle du sacrement de l’Eucharistie établi par le Seigneur Jésus Christ.

Dans l’ancien testament le pain levé est opposé au pain “azyme” [ζυμος/azymos], en effet l’azyme symbolise l’impuissance du peuple hébreu, forcé à quitter l’Egypte à la hâte, il est associé aux sacrifices de l’ancienne alliance qui interdisent le sacrifice de pain levé, à l’exception notable de Lévitique 7:13 et 23:17, où le sacrifice des pains levés est accepté car il représente l’action de grâce du peuple.

Dans les Évangiles le pain levé est utilisé de deux manières. La première consiste à désigner la puissance du Royaume des Cieux (cf. Mt 13:33 ; Lc 13:20). La deuxième façon dont les Évangiles utilisent le levain est symbolique des doctrines des pharisiens – l’assimilation au levain révèle la force de l’attraction dans les actes extérieurs de piété par les pharisiens, quelque chose contre lequel saint Paul luttera plus tard (cf. Mt 16:6 ; Mc 8:14 ; Lc 12:1)

Il est donc évident le levain est une image puissante, et ses connotations positives ou négatives dépendent complètement du contexte.

Le pain levain devient également un symbole de l’ouverture de l’alliance aux non-juifs; l’azyme associé au deuil et à l’impuissance est remplacé par le levain de la résurrection et du triomphe du Christ.

Cette même idée est exprimée chez les pères de l’Eglise primitive, comme chez le grand Évêque occidental, Saint Irénée de Lyon (202), qui explique que le Christ est réellement le pain levain, une analogie directe au sacrement de l’Eucharistie.

« Paul affirme encore que le Sauveur a assumé les prémices de ce qu’il allait sauver: “Si les prémices sont saintes, dit-il, la pâte l’est aussi”. Les prémices, enseignent-ils, c’est l’élément pneumatique ; la pâte, c’est nous, c’est-à-dire l’Église psychique ; cette pâte, disent-ils, le Sauveur l’a assumée et l’a soulevée avec lui, car il était le levain. » – Saint Irénée de Lyon (Contre les hérésies, liv. I chap. 8)

En ce qui concerne l’Eucharistie en elle-même, les écritures nous renseignent sur l’usage par le Christ de pain levé lors de la Cène mystique.

Dans la version originale des Évangiles en grec, le mot pour “pain sans levain” se dit donc “ζυμος/azymos”, le mot pour “pain avec levain” se dit quant à lui “ρτος/artos”.

« Alors qu’ils mangeaient, Jésus prit du pain [ρτον/arton], et après la bénédiction, il le rompit et le donna aux disciples, et dit: Prenez, mangez, ceci est mon corps. » – Matthieu 26:26 (Mc 14:22 ; Lc 22:19 ; 24:30-35 ; I Co 10:16-17 ; 11:26-28)

Dans tous ces endroits, les auteurs ne disent jamais que Jésus a pris l’azyme et l’a béni, ils écrivent que le Christ a pris du pain au levain ordinaire.

« Comme le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que je vis par le Père ; ainsi celui qui me mange vivra par moi. C’est ici le pain [ρτος/artos] qui est descendu du ciel. Ce n’est pas comme vos pères qui ont mangé la manne, et ils sont morts ; celui qui mangera ce pain [ρτον/arton] vivra éternellement. » – Jean 6:58

Le Saint concile In Trullo (691-692) qui composa les canons du 5ème et 6ème concile Oecuménique et fut accepté universellement (y compris par le pape Adrien Ier et le 7ème concile Oecuménique), confirme et réaffirme la tradition de l’Eglise en condamnant l’usage des azymes comme une innovation judaïsante :

Canon XI.- Qu’il ne faut pas fréquenter les Juifs, converser avec eux ou recevoir d’eux des médicaments. Qu’aucun de ceux qui sont inscrits dans les rangs du clergé, ou même un laïc ne mange les azymes en usage chez les Juifs, ni ne se rende leur familier ni ne les appelle dans les maladies, recevant d’eux des remèdes, ni ne fréquente absolument les bains publics en leur compagnie ; si quelqu’un tente de faire cela, clerc, qu’il soit déposé, laïc, excommunié.

L’Eglise Orthodoxe, en suivant les Saintes Ecritures, la Sainte Tradition des Pères et les Conciles, a donc toujours utilisé le pain levé pour célébrer l’Eucharistie et rendre le Christ présent parmi son peuple.

Foi-orthodoxe

 

La communion fréquente

 

Le Fils prodigue –

« Amenez le veau gras et tuez-le. Mangeons et réjouissons-nous » (Luc 15,23)

« Comme le Fils prodigue de la parabole, nous aussi, en retournant vers la maison du Père et en renonçant à notre mode de vie dissolue, nous retrouvons Dieu notre Père qui nous attend avec amour. Il court au-devant de nous, Il nous prend dans ses bras et nous couvre de baisers. Il nous introduit dans la maison paternelle et là, Il nous réunit à nos autres frères et Il nous sert à la Table céleste. Il nous fait communiants à son Corps et à son Sang. Sur ce point-là, je voudrais signaler quelques malentendus.

Malentendus

Beaucoup croient que la divine communion est nécessairement liée à la confession et au jeûne. Nous n’allons pas vers la divine communion si auparavant nous ne nous sommes pas confessés et si nous n’avons pas jeûné un nombre suffisant de jours. C’est pourquoi aussi nous communions tellement rarement.

La Tradition

Ceci est une faute et c’est contraire à la Tradition Orthodoxe qui est pour la divine communion fréquente. Ce qui est observé de nos jours [dans certaines communautés], c’est-à-dire de communier 2 à 3 fois par an, est complètement inacceptable et sape dangereusement le Corps du Christ qui est l’Église. Nous en arrivons au point où nous mettons le jeûne au-dessus de la divine communion qui est le « sacrement des sacrements ». De ce qui est un moyen, nous faisons un but, et nous trouvons un alibi pour justifier notre négligence et notre indifférence pour la communion fréquente, sceau de notre participation à la divine eucharistie.

Les anciens chrétiens communiaient presque chaque jour. Basile le Grand décrit comment les chrétiens de son diocèse communiaient au moins quatre fois par semaine. Il était inconcevable pour eux de participer à la divine liturgie et de ne pas communier, sauf s’ils se trouvaient en situation d’épitimie (de pénitence), à la demande de leur père spirituel.

L’offense faite à Dieu

Si les ancêtres de nos pères spirituels revenaient aujourd’hui dans notre propre église et voyaient ce phénomène inacceptable, c’est-à-dire que la divine liturgie se déroule et que, soit on ne communie pas, soit seulement un petit nombre de fidèles participe à la communion, ils éprouveraient un terrible étonnement et beaucoup de perplexité, pour ne pas dire de tristesse.

Pour chaque célébration de la divine liturgie, nous préparons le vin et le pain de l’Eucharistie, nous les présentons aux fidèles lors de l’entrée des saints dons, nous prions Dieu de les transformer en Corps et Sang du Christ. Dieu obéit à notre demande, l’Esprit Saint descend sur les dons, le miracle a lieu. Notre Seigneur nous prépare sa table, il nous invite à participer : « avec crainte, foi et amour, approchez » et nous, nous le dédaignons.

[Si nous ne communions pas], nous repartons affamés, mais rassasiés par des justifications de peu de valeur. À ce stade, saint Jean Chrysostome dit : « N’as-tu pas offensé Celui qui t’a invité ? ».

Le renouveau eucharistique

De nos jours, on observe un effort, timide certes, mais béni, parmi les pères spirituels éclairés et les chrétiens, pour rompre cet état de fait et pour revenir à la tradition de la divine communion fréquente.

Mais si nous voulons communier fréquemment – toujours bien sûr en accord avec l’avis de notre père spirituel – alors, il n’est pas possible que nous nous confessions fréquemment. Lorsque nous avons quelque chose à dire, à confesser, alors nous voyons le père spirituel. Pas pour les plus petites choses. Si, par exemple, nous faisons une chute et que le traumatisme est faible, il n’est pas nécessaire de déranger le médecin. Si le traumatisme est important, alors sûrement, nous lui rendrons visite.

La confession fréquente

Mais, dès lors que nous ne pouvons pas éviter facilement nos fautes quotidiennes, nous nous efforcerons de vivre le continuel repentir et la confession régulière.

L’autre extrême est que nous nous confessons trop légèrement et rarement. Surtout, pour la plupart d’entre nous, nous programmons de nous confesser avant les grandes fêtes, au dernier moment, et nous devenons particulièrement exigeants. Ceci est fâcheux pour nous, mais aussi pour le confesseur, lequel, en raison de la charge de ces journées, ne peut pas répondre et nous aider le mieux possible. Et de ce fait, lorsque le temps presse, nous ne pouvons pas créer une communication correcte entre nous et notre père spirituel.

Le repentir continuel

Les recettes connues d’avance n’existent pas. Chacune, chacun d’entre nous possède sa spécificité, ses besoins propres et nous pouvons trouver avec notre père spirituel notre règle d’or ! De toute façon, ce sur quoi il est besoin d’insister, c’est que toute notre vie doit être un chemin de repentir devant Dieu, source de joie, mais aussi une préparation pour la divine communion. Chaque jour, chaque heure, chaque instant, vivons avec sérénité et paix, en « état de repentir » et avec le désir ardent de la divine eucharistie.

Pour vivre cet état, ce mode de vie, l’office de la sainte communion nous aidera beaucoup. Nous pourrons le lire et communier à ses prières, pas seulement la veille de la liturgie, mais par étapes pendant toute la durée de la semaine. Les très belles prières des pères de l’Eglise que contient cet office nous aideront à vivre l’événement du repentir, source de paix, et elles nous prépareront pour notre participation au sacrement de la divine communion.

Vivant continuellement « en état de repentir » et communiant fréquemment aux mystères immaculés, notre vie acquiert un sens, devient festivité, fête, sagesse et joie. »

Archimandrite Nectaire Antopoulos, « Epistrophi », éd. AKRITAS, Néa Smirni, Grèce.